Valorisons, valorisons !
Je viens de terminer ma formation « en ligne » de formateur forestier. Ce cours sur plateforme s’appelle « Forestry Edutrainer ». Et ouais, tout de suite, en anglais, ça en jette carrément. Regarde, en français, ça donne : formateur forestier… Ouais, hein, on est d’accord, tout de suite, c’est plus minable !!!
Bon, trêve de bavardage, c’est pas le sujet. Les concepts, nombreux, véhiculés par cette formation, sont bien dans l’air du temps. Il faut valoriser l’apprenant, positiver, valider tout ce qui peut être validé même chez l’individu qui à priori n’aurait pas grand-chose de « validable ». Sus à la défaite, à l’échec. L’individu quel qu’il soit, doit parvenir à trouver sa voie, au pire sa voix, si c’est un chanteur ! (ahahah !). Pour cela, quoi faire ? Mes frères, je vous le dis, il faut valoriser. On y est, c’est là que je voulais en venir même si ma voie à moi est parfois sinueuse.
Du coup, je pense à vous tous amis blogueurs. Certes, vous écrivez d’abord pour vous, dans votre petit blog. Vous vous refaites le coup du journal intime qui est sensé le rester. Vous n’en attendez rien. Sûr ? Pas sûr !
Car, même pour ce vieux journal intime écrit sur ce carnet au fond de la malle au fond du grenier, l’auteur s’autorisait à penser qu’un jour un de ses descendants ferait cette découverte surprenante. Pour vous, c’est pire ! Ce journal, ses textes, ces promenades, ces pensées, ces idées, ces fantasmes qui sait, vous les mettez quand même en ligne ! Le monde entier potentiellement peut vous lire. Quand même !
Alors oui, fi des précautions d’usage, de la discrétion, du secret, de l’humilité, de la retenue. Dans un coin obscur de votre cerveau, vous en attendez quelque chose. Des « j’aime », des « likes », ou alors le must, des « commentaires », des « retours ».
Quant à moi, je n’y ai pas pris garde… J’ai commencé à écrire en 2012. Au début, j’envoyais mes textes par mail à des connaissances. Quelle inconscience ! Attentes vaines d’échanges, à minima de retours. Il fallut bien s’y résoudre. L’écriture restait un plaisir surtout solitaire. Alors que faire de tout ce flot qui se déversait de moi telle une bouteille en plastique au bouchon certes bien fermé mais fissurée. Il arrive bien souvent que derrière l’écriture se cachent des blessures, même celles que l’on ignore encore.
Les blessures ne manquaient pas. Pourtant, l’une d’entre elles, était juste effleurée, ressentie. Incapable de lui donner un nom. Il fallait remonter plus loin dans le temps. Le temps où il n’était pas convenable de dire à un enfant : c’est beau, c’est bon, c’est chouette, c’est super, bravo. Le risque semblait trop élevé, que des félicitations pareilles puissent lui monter à la tête et donner naissance à un orgueil honni. C’était le temps de l’humilité, de la simplicité, de la frugalité, de l’altruisme. Quelle incongruité de vouloir penser à soi-même.
Aujourd’hui j’en arrive à penser que nos pères y sont allés peut-être un peu trop fort. Du coup, que d’énergie, d’efforts, de souffrance, pour aller chercher, réclamer, mendier même, tels des « likes » sur face de bouc, ce que je pourrais appeler, la valorisation.
Et pourtant, pour la trouver, pour l’obtenir, un claquement de doigt est bien loin de suffire. Car aujourd’hui, tout le monde la veut, tout le monde la réclame, tout le monde veut exister, tout le monde joue des coudes, comme au départ d’un marathon. Alors, tout le monde crée, fabrique, pense, publie, partage, impose même à ce qu’on partage, une vraie foire d’empoigne.
Au final, on se replie, on retourne au plus profond de son blog, et l’on s’accroche à se valoriser soi-même, tout seul, et croire en soi. Faire porter cette valorisation que sur ses propres épaules, oh oui, c’est possible la plupart du temps. Mais on peut se faire surprendre certains jours. Elle deviendrait subitement trop lourde à porter.
Je jette parfois un regard circulaire, sur les alentours. Je vois cette galerie de personnages qui défilent devant moi. J’observe les flux. Le flux de ce qu’ils ont besoin de sortir d’eux-mêmes. Le flux de ce qu’ils sont prêts à recevoir de moi. Je sais que la magie réside dans l’équilibre. Cet équilibre… Tellement difficile à trouver !