Caces nacelle

Il y a quelques temps, j’ai « repassé » le « CACES nacelle ». « CACES », une abréviation qui est parvenue à entrer dans le langage courant. Chapeau ! Il y a comme ça des sigles qu’on emploie sans plus savoir ce qu’ils veulent dire, genre CAF, SNCF. C’est indéniablement un signe de réussite.

« CACES », ça veut donc dire : certificat d’aptitude à la conduite en sécurité ». On aurait pu dire « à la conduite d’engins en sécurité », car qui dit CACES dit « engin ». Les nacelles sont des engins, d’où, banco, « CACES ».

Alors, sempiternelle question : le CACES est-il obligatoire ? Facile… Quand on vous parle de « certificat », ça doit vous mettre la puce à l’oreille. En général, un « certificat » est rarement obligatoire. Non, un CACES n’est pas obligatoire. C’est l’autorisation de conduite délivrée par l’employeur qui est obligatoire. En la signant, le chef d’entreprise engage sa responsabilité. Il certifie que vous êtes apte à conduire « l’engin ».

Il peut très bien cependant vous former lui-même. Mais il peut être amené à le prouver. Soi-disant, c’est difficile à prouver. C’est bien sûr l’argument des organismes de formation qui « font passer » des CACES. Pour prouver que vous êtes formés, rien de tel que de passer un bon vieux CACES. CQFD. Tiens, ça veut dire quoi déjà CQFD… ?

« Passer le CACES », ce serait donc le top, plutôt qu’une formation dans l’entreprise. OK. Donc, passons à la loupe le CACES nacelle par exemple. Pour le CACES nacelle, le tarif, aujourd’hui, c’est 4 jours. Bigre…4 jours… ! Pour le boss, trouver les financements pour le payer, c’est jouable. Il n’en reste pas moins que c’est 4 jours pendant lesquels le salarié ne rapporte pas un centime. Ah ben ça doit être pour ça que pendant mes 23 ans d’élagage, je n’ai jamais passé le CACES… !

Mieux. Le CACES nacelle a été remodelé. On est maintenant formé à la fois pour la nacelle sur camion et la nacelle automotrice, d’autorité. La nacelle automotrice ne sert à rien pour un élagueur. Pas grave… On va quand même pas devoir s’adapter à chaque métier en particuliers !

Le problème, c’est que la nacelle automotrice, c’est celle avec laquelle il faut le plus de temps pour se familiariser. Résultat, on lui consacre une journée entière. Enfin, une journée… Si vous êtes un groupe de 6-7 personnes, sur 7 heures de formation moins les temps morts, vous faites le ratio… Vous vous familiarisez que dalle.

Pas grave. Le discours de l’organisme de formation aujourd’hui, c’est de vous dire que la manipulation de la nacelle dans la note globale qui vous sera attribuée le jour de l’examen, ne pèse pas très lourd. Ce qui est important, c’est la sécurité. Donc, genre, à combien on peut monter dedans, la vitesse maximum du vent, la mise en place des béquilles pour la nacelle camion, les commandes de secours, tout ça, tout ça.

Bref, comme le listing de toutes ces préconisations est toujours un peu rengaine, le jour de l’examen, le gros du temps de l’épreuve est consacré à… ? Bingo ! La manipulation de la nacelle ! Et avec la nacelle automotrice, avec moins d’une heure de manipulation dans les pattes, ça peut vite devenir rock’n roll !

D’ailleurs, le jour de « l’examen », rebelote. Vous êtes 6-7 personnes. Un formateur. Le formateur, ou la formatrice, se fait plaiz avec la nacelle automotrice que vous faites aller dans tous les sens. Résultat, il expédie la nacelle camion manu militari. Résultat, vous êtes élagueur ? Vous voilà prêt pour aller dans le TP. Enfin plutôt dans le fossé !

Ouais mais dis, 4 jours, comment ils font pour t’en mettre pour 4 jours… ? Facile, déjà t’as un jour d’examen où tu passes ton temps à attendre que les collègues passent. Bien prévoir son stock de clopes. Et puis, tu as une journée de théorie. Une journée de théorie !!!

Ben ouais, facile. T’as carrément droit à un cours de législation du travail. Tout y passe : le code du travail, la médecine du travail, l’Inspection du travail, la Sécu, le droit de retrait. C’est sûr, le formateur ne peut quand même pas tenir les 7 heures de théorie avec les différents types de nacelles et le suivi du carnet d’entretien.

Je me souviens, en entreprise, le truc où on était le moins bon, c’était les commandes de secours, quand la bébette restait bloquée. Pas mal à voir ça. Oui mais non. Parce que c’est vachement long, complexe, différent d’une nacelle à l’autre. Alors, au CACES, on te dit : « bon là c’est les commandes de secours, mais c’est vachement compliqué, et puis c’est différent d’une nacelle à l’autre alors on ne va pas s’éterniser… ». Bon OK.

Pour terminer, je reviendrais une dernière fois sur cette nacelle automotrice. J’avoue qu’elle m’a un peu, carrément (!) traumatisé ! La partie formation a été assurée par un formateur très sympa, type coach sportif : « C’est bien… ! Ouais nickel… ! Ouais bravo… ! Ouais c’est ça… ! » Le type voyait surement que j’étais nul à chier mais bon, il valorisait. C’est très à la mode ! Seulement, le jour de l’examen, on est tombé sur un « engin » justement, enfin plutôt un dragon : « Mais non ! Mais non avance ! Mais non recule ! Allo ? Allo ? Allo tu m’entends ? Allo tu m’écoutes quand je te dis quelque chose ? » Une caricature !

Ma formatrice termine en bradant le passage sur la nacelle camion, en commençant par les ritournelles de sécurité. Ce qui nous donna… (Véridique !) :

« Combien peut-on charger dans cette nacelle ? ». Je regarde le chiffre indiqué par la plaque et lui réponds : « 230kg ». « Oui mais on ne charge jamais que du matériel. On estime le poids d’un homme à 80kg. Alors…, combien peut-on charger de matériel ? ». Je réponds : « 230-80= 150kg ». « Oui, mais enfin, on monte la plupart du temps à 2 dans une nacelle ! ». Je réponds : « Alors ça nous donne 230-160=70kg ». Totalement authentique !!

J’ai eu un peu peur qu’elle attaque ensuite sur des exercices de robinets d’eau ou de vitesse de train comme au bon vieux temps de l’école primaire de nos aïeux.

En synthèse, je dirais, après avoir régulièrement utilisé des nacelles pendant 23 ans sans aucune difficulté particulière, que je n’ai jamais été aussi nul que ce jour-là, sous les yeux bienveillants de ma formatrice nacelle bien aimée.

Le « CACES » n’est pas obligatoire donc. Il a surement été créé à l’époque pour de bien nobles raisons, je n’en doute pas. Ils sont en train de le transformer en coup de tampon insipide. Ils sont en train de le tuer. La sécurité « rengaine », la sécurité « prechi-precha », tout cela tue la sécurité. C’est peut-être ça le plus grave !