rooock''n roll

Rooooock’n roll !!!    

Manosque, 21 juin 2014, fête de la musique ; trois vieux briscards, pas loin de soixante balais balancent sur des guitares poussiéreuses toutes les perles anglo-saxonnes de notre enfance, on les connait toutes, on s’éclate, on se croyait seul au monde, oh ya pas foule, mais tous les présents ont la banane jusqu’aux oreilles … !

Des trucs d’alcooliques comme dit le chanteur, juste avant de se vautrer sur le toit d’une bagnole en continuant de chatouiller les cordes de la gratte, autodérision totale, plaisir total aussi, on a bien du mal à aller voir le groupe plus loin, merci les gars.

Oh un rappeur de fromage qui donne dans l’autodérision, ça doit bien exister, enfin si vous avez une vidéo, faites passer quand même…

L’autre jour, j’ai des p’tits jeunes en formation ; au milieu de la bande, le plus « charismatique », le plus « grande gueule » quoi : je te monte dans le bus, je te choisis la station, Skyrock évidemment, je te la mets au fond, casquette de naze à fond sur le crâne, la connerie n’a plus aucune chance de pouvoir ressortir…

Je baisse, j’arrive pas à conduire quand c’est trop fort. Du coup on tchatche, c’est un tchatcheur, sympa en fait le môme. Qu’est-ce t’écoute toi comme musique, je lui réponds super fier, du rock, que du rock. Et il me répond, ouais « ces mecs qui font bouger leurs cheveux comme ça devant leur tronche, tête baissée ». Succès d’audience immédiat à l’arrière du bus, pas la peine de lutter, je joue à l’extérieur.

Va falloir s’arrêter, galérer pour se garer, « tchatcheur » n’aime pas le pique-nique du centre, faut qu’il achète à bouffer, industriel, avec sa paie de contrat d’avenir, et sa mère qui galère au RSA, ça va prendre des plombes, tout le monde l’attend, rien à foutre, mais il est sympa, charismachin alors tous les autres ferment leur gueule, je lui en balance une du genre « tu fais chier tout le monde », personne ne le défends non plus, j’ai planté un but à l’extérieur.

Ceci dit, il a un peu raison le môme, les rappeurs de carotte racontent son quotidien, bon un peu stéréotypé, à longueur de journée, je ne connais pas un triste mot de ce que nous racontais un Peter Gabriel ou encore Joe Strummer. Y avait qu’à voir le succès de Téléphone ou de Trust qui cassaient quand même pas trois pattes à un canard…

Mais la musique, putain la musique, résultat trente piges plus tard, on écoute encore, je parie pas un kopek sur le moindre rappeur dans trente piges Ah l’autre, le vieux con ! Ouais c’est vrai, argument complètement débile, l’histoire des trente piges, c’est valable pour tout ce qui nous entoure aujourd’hui, ça s’accélère tellement vite, on se croirait dans le tourbillon de l’eau des chiottes quand on tire la chasse, qu’on est obligé de tirer vu le stock de merde à évacuer…

Ouais, rock is not dead, tu parles… A la fin, Phil Collins rentrait en avion tous les soirs en Ecosse, pour emmener sa gamine à l’école le matin, Jagger connait tous les bons plans de la finance internationale, et « on ne nous dit pas tout », à partir du moment où le pognon coule à flot… Strummer avait décidé d’arrêter, emmener sa gamine le matin à l’école, et chanter « no future » sur les planches le soir, fallait pas déconner, merci Joe, on t’aime…

Alors, ils en sont où nos rockers aujourd’hui…Déjà, tous ceux qui sont englués dans le pognon, c’est bon, le rock n’a jamais fait bon ménage avec le pognon. Les rappeurs à bois n’ont aucun complexe, enfin si y en a quelques uns, mais aucune chance de les entendre sur les ondes. Les autres, avec leur quincailleries, leurs bimbos à poil, leurs bagnoles et leurs marques de fringues fabriqués par des miséreux au Bengladesh, à chier…

Nous, on a les rockers passés dans la sphère culturelle. Bon, j’ai rien contre des canards comme Télérama, mais quand t’as ton nom là-dedans, comme rocker, t’es mort, ok tout finit par devenir culturel, mais le rock, c’est pas un truc de salon, ou alors pour éventrer les canapés…

Chez les p’tits nouveaux, putain, qu’est-ce qui sont sérieux, limite intello. Y en avait aussi l’autre jour à la fête de la musique, techniquement super bons, super son, avec en plus des discours, sur leurs influences, leurs recherches de sons, l’ennui total, on s’est barré, des coups à retourner voir des vieux cons, labourer leurs guitares avec trois quatre accords.

On a aussi tous nos vieux qu’ont fini par se trouver trop vieux et qui maintenant nous font des chansons à texte, parce qu’ils deviennent philosophes, sages, contemplatifs, on n’en rien à foutre, on veut des riffs, même à cinquante piges, réfléchir, on verra  ça ailleurs, on veut que ça crache, que ça saigne, que ça sue, que ça pète dans tous les sens bordel.

Y a que les « metals » qui s’en sortent, ils nous pondent des concerts, des festivals, ils déboulent tous avec leurs cuirs et leurs jeans cloutés, leurs bécanes chromées, leurs cerveaux en petit poids, et leurs nanas, ailleurs, à la maison, ou alors elles aussi déguisées, bien sexy à souhait pour tous les gros mâles environnants, une farce…

Sectaire moi, ouais complètent sectaire, le mec qui planque chez lui des disques de Johnny Halliday, dénoncé à la Stasi, tous les mecs qu’ont collaboré avec ce mec, devant les tribunaux populaires, et le grand blond, aux assises, pour avoir dénaturé la révolte, abat la soumission, abat la compromission, bon faut que je me calme !!!

C’est des coups à étouffer, à se repinter à la bière, renverser les poubelles, aller hurler sous les fenêtres des « bourges » horrifiés, putain, j’vais r’prendre la gratte moi, viendez ma bande. Je ne répondrai à aucune interview, allez tous vous faire… non quand même pas, les rockeurs ont des cœurs d’artichaut, grands comme citrouilles qui explosent au milieu du jardin.

Rooooock’n roll !!!